le lexicologue Jean Pruvost, nous raconte comment cette langue s'est
inscrite dans l'Histoire et la langue française, et nous explique que
chaque jour nous utilisons de nombreux mots arabes.
Ce matin au petit déjeuner, vous avez peut-être commandé une tasse (mot
arabe) de café (mot arabe), avec ou sans sucre (mot arabe) et un jus
d’orange (mot arabe). Vous avez donc, sans le savoir, parlé arabe (ou
plutôt français).
Notre langue est parsemée de mots arabes, comme l’explique Jean Pruvost, lexicologue, professeur émérite, auteur de « Nos ancêtres les Arabes, ce que notre langue leur doit » aux éditions JC Lattès.
Quelle est la place de la langue arabe dans la langue françaises ?
Jean Pruvost : La langue arabe est extrêmement
présente dans la langue française. L'arabe est la troisième langue
d’emprunt, puisque la première c’est l’anglais, ensuite l’italien.
L’arabe n'a cessé d'enrichir notre langue entre le IXe siècle et
aujourd'hui. Au départ, c'est principalement Al Andalus, l'Espagne
musulmane qui a donné de nombreux mots courants et mots savants au XIIIe
siècle en français. Plus tard, la colonisation et la décolonisation ont
apporté une nouvelle vague de mots, avec notamment un volet important
dans le domaine de la gastronomie.
Pouvez-vous donner des exemples des mots courants qui nous viennent de la langue arabe ?
J. P. : Si vous faites votre marché et que vous
achetez des épinards, de l'estragon, du potiron, des artichauts... Tous
ces mots sont arabes. Même le mot "artichaut" qui ne vient pas de
Bretagne ! Avec l'arrivée des rapatriés d'Algérie en 1962, après la
décolonisation, les mots merguez, méchouis, sont entrés dans le langage
courant.
On retrouve aussi beaucoup de mots dans l’habillement. Si vous allez
dans un magasin (mot arabe), acheter une jupe (mot arabe) de coton (mot
arabe), un gilet et un caban (mots arabes), vous utilisez des mots
arabes.
Et plus récemment, de nouveaux mots arabes sont apparus avec l'immigration récente ?
J. P. : Le mot "bled" a été tellement installé dans
la langue que beaucoup ignorent que c'est un mot arabe. Les plus jeunes
s'en sont à nouveau emparé avec le mot "blédard", qui désignait celui
qui débarquait de la campagne algérienne ou marocaine et qui
s'installait dans la région parisienne.
Avoir le "seum", c'est-à-dire le cafard en arabe, ("cafard", qui est
aussi un mot arabe) a été repris en 2012 par une campagne de la sécurité
routière.
Les mot "chouf" ou "kiffer" sont utilisés depuis longtemps, comme
dans l'expression kiff-kiff bouricot. Au début, le kiff c'était la
drogue et aujourd'hui, cela désigne le fait de prendre du plaisir.
Le mot toubib vient du mot toubab (qui désigne le
blanc) et veut dire médecin. Ce mot est passé dans la langue familière
et beaucoup de gens ne savent pas qu'il est issu de la langue arabe.
En fait les Français parlent arabe ?
J. P. : Oui, ils parlent arabe beaucoup plus que
gaulois... Le gaulois, c'est à peine un centaine de mots. Pour l'arabe,
on est à 500 mots et même davantage si l'on compte les mots savants du
côté de la faune et la flore. Un enfant qui part faire de l'algèbre et
de la chimie dans son collège est dans le monde arabe.
franceinter.fr
Comme quoi,
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